La Déchirure et le voyage culturel au Cambodge

Film oscarisé de Roland Joffé (1984), « La Déchirure » retrace l’histoire vraie de Sydney Schanberg, journaliste américain, et son assistant cambodgien Dith Pran durant la prise de pouvoir des Khmers rouges en 1975. Cette œuvre poignante explore l’amitié, la loyauté et les horreurs du génocide cambodgien à travers un regard bouleversant.

Contexte historique et culturel du film

Génocide cambodgien et mémoire collective

Le génocide cambodgien représente l’une des pages les plus sombres de l’histoire du XXe siècle. Entre le 17 avril 1975 et le 7 janvier 1979, le régime des Khmers rouges dirigé par Pol Pot a causé la mort de 1,5 à 2 millions de personnes, soit environ 21 à 24% de la population cambodgienne de l’époque. Cette politique ultra-maoïste visait à transformer le pays en une société agraire utopique, mais s’est traduite par des massacres systématiques, des déportations massives, du travail forcé et des famines.

Les victimes étaient principalement les anciens dirigeants militaires et politiques, les intellectuels, les professionnels, ainsi que les minorités ethniques et religieuses comme les Chams musulmans et les Vietnamiens. Ce n’est qu’en 2018 que la qualification de génocide a été officiellement reconnue par un tribunal international.

« La Déchirure » de Roland Joffé (1984) a joué un rôle déterminant dans la médiatisation internationale de cette tragédie. Récompensé par trois Oscars en 1985 (meilleur acteur dans un second rôle pour Haing S. Ngor, meilleure photographie et meilleur montage), le film a provoqué une véritable déflagration dans l’opinion publique occidentale, révélant des images jusqu’alors peu diffusées des charniers et des exactions quotidiennes.

Le rôle des médias dans la prise de conscience internationale

Le film s’inspire de l’histoire vraie de Sydney Schanberg, journaliste du New York Times qui a reçu le prix Pulitzer en 1976 pour sa couverture courageuse de la chute de Phnom Penh. Alors que la plupart des journalistes occidentaux avaient fui, Schanberg et son assistant cambodgien Dith Pran sont restés pour témoigner de l’horreur.

Les scènes clés du film retracent fidèlement les événements dramatiques d’avril 1975 : l’évacuation forcée de Phnom Penh vidée de ses habitants en quelques jours, les exécutions sommaires des officiers et responsables du régime précédent au stade olympique, et le refuge des expatriés à l’ambassade de France. Cette dernière est devenue un sanctuaire pour environ 800 étrangers et 600 Cambodgiens, bien que les Khmers rouges aient finalement exigé l’expulsion des Cambodgiens, rejetant tout droit d’asile.

Analyse du film et son impact sur la perception du Cambodge

Une amitié au cœur de l’horreur

« La Déchirure » (1984) de Roland Joffé transcende le simple film historique pour devenir une œuvre profondément humaine centrée sur la relation exceptionnelle entre Sydney Schanberg et Dith Pran. Cette amitié représente « une seule âme habitant deux corps », comme l’aurait défini Aristote. Le journaliste américain et son interprète cambodgien développent un lien qui va bien au-delà de la simple collaboration professionnelle, symbolisant la loyauté dans des circonstances extrêmes.

Le film explore avec finesse la culpabilité ressentie par Schanberg pour n’avoir pas insisté davantage afin que Pran quitte le pays avec sa famille avant la chute de Phnom Penh. Cette trahison involontaire devient le moteur de sa quête incessante pour retrouver son ami, recherche qui durera près de quatre ans. Leur réunion finale dans un camp de réfugiés thaïlandais, accompagnée par « Imagine » de John Lennon, constitue l’un des moments les plus émouvants du cinéma des années 1980.

Haing S. Ngor, qui incarne Dith Pran, apporte une authenticité bouleversante au film. Médecin cambodgien ayant lui-même survécu aux atrocités des Khmers rouges, il n’avait jamais joué auparavant. Sa performance lui valut l’Oscar du meilleur second rôle en 1985, devenant seulement le deuxième non-professionnel à recevoir cette distinction. Pour Ngor, ce rôle représentait la promesse faite à sa femme, morte pendant la répression, de raconter l’histoire du Cambodge au monde entier.

Les Killing Fields : entre cinéma et réalité

Le réalisateur Roland Joffé a relevé le défi de représenter l’indicible avec une précision quasi documentaire. « Ce n’était pas une question de dépeindre exactement ce qui s’est passé. Nous voulions que cela paraisse aussi réel que possible mais, plus important encore, transmettre exactement ce que l’on ressentait en y étant ».

Pour recréer Phnom Penh des années 1970, l’équipe a tourné principalement en Thaïlande. Le tournage a nécessité un travail méticuleux sur les costumes, « les traînant dans le sable, roulant dessus avec des camions, les lavant des centaines de fois pour qu’ils semblent avoir été dans un conflit ». Cette attention aux détails contribue à l’impression d’immersion totale qui caractérise le film.

Scène du filmÉvénement historiqueLieu actuel
Évacuation de l’ambassadePrise de Phnom Penh (avril 1975)Monument de l’Amitié à Phnom Penh
Camps de travailChoeung Ek (Killing Fields)Site mémorial visité par 500 000 touristes/an
Fuite de PranTraversée vers la Thaïlande (1979)Camps de réfugiés à la frontière thaïlandaise

L’expression « killing fields » (champs de la mort) a été inventée par Dith Pran lui-même pour décrire les zones parsemées de cadavres et de restes squelettiques qu’il a traversées lors de sa fuite de 60 kilomètres. Ce terme est désormais ancré dans la conscience collective mondiale, témoignant de l’impact durable du film sur notre perception du génocide cambodgien.

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Le Cambodge aujourd’hui : tourisme et devoir de mémoire

Sur les traces du film

Le Musée du génocide de Tuol Sleng à Phnom Penh, ancienne prison S-21 des Khmers rouges, est devenu un lieu de mémoire incontournable. Ce site préserve les preuves d’une période tragique de l’histoire cambodgienne, avec pour objectif d’encourager les visiteurs à devenir des messagers de paix. Les bâtiments, autrefois une école, ont été transformés en cellules de détention et salles d’interrogatoire, offrant un aperçu glaçant de l’horreur vécue par les prisonniers.

Tourisme mémoriel : entre respect et sensibilisation

Le tourisme au Cambodge a connu une croissance significative, avec 5,43 millions de visiteurs internationaux en 2023, soit une augmentation de 139,5% par rapport à 2022. Parmi ces visiteurs, on estime qu’environ 50 965 étaient français en 2023. Cette affluence souligne l’importance d’un tourisme responsable et éthique.

Bonnes pratiques pour un tourisme respectueux :

  • Éviter les selfies sur les sites historiques, particulièrement dans les lieux de mémoire comme Tuol Sleng.
  • Privilégier les guides locaux pour soutenir l’économie et bénéficier d’une perspective authentique.
  • Respecter le code vestimentaire : couvrir les épaules et les genoux lors des visites de temples.
  • Retirer ses chaussures avant d’entrer dans les bâtiments religieux.
  • Demander la permission avant de photographier des personnes, surtout dans les lieux de culte.

Le tourisme mémoriel au Cambodge joue un rôle crucial dans la préservation de l’histoire et la sensibilisation aux atrocités passées. En visitant des sites comme Tuol Sleng, les touristes contribuent non seulement à l’économie locale mais participent également à un devoir de mémoire essentiel. Il est primordial d’aborder ces lieux avec respect et considération, en gardant à l’esprit leur signification profonde pour le peuple cambodgien.

Préparer son voyage : conseils et immersion culturelle

Ressources cinématographiques pour approfondir

Pour mieux comprendre l’histoire et la culture cambodgiennes avant votre voyage au Cambodge, quelques œuvres cinématographiques sont essentielles :

  • Les Gens de la rizière (1994) : Premier film de fiction de Rithy Panh qui raconte l’histoire de Vong Poeuv, sa femme et leurs sept filles, dont la vie est rythmée par la culture du riz. Une immersion dans la vie rurale cambodgienne traditionnelle et sa fragilité.
  • First They Killed My Father (2017) : Adaptation des mémoires de Loung Ung, fillette de cinq ans dont la famille est déplacée lors de la prise de pouvoir des Khmers rouges. Le film, tourné presque entièrement en khmer avec des acteurs cambodgiens, offre une perspective poignante sur le génocide.
  • S21, la machine de mort khmère rouge (2003) : Documentaire bouleversant de Rithy Panh qui confronte d’anciens prisonniers et leurs geôliers dans l’ancien centre de détention S-21 à Phnom Penh, devenu aujourd’hui le Musée du génocide de Tuol Sleng.

Tableau comparatif : expériences à vivre

ActivitéLieuDescription
Visite des temples d’AngkorSiem ReapExplorez les incontournables Angkor Wat, Ta Prohm et Bayon. Prévoyez 3-4 jours à Siem Reap pour une visite complète sur 2-3 jours.
Rencontre avec des survivantsBattambangVisitez l’ancienne maison de Madame Bun Roeung, où la famille a perdu 100 membres pendant le régime des Khmers rouges. Écoutez les témoignages des survivants et découvrez l’histoire tragique de « Madame cigarettes ».
Train de bambouBattambangExpérience unique sur ce train traditionnel créé en 1980, aujourd’hui attraction touristique (10 USD en solo, 5 USD en groupe).

Conclusion

« La Déchirure » demeure, quarante ans après sa sortie, une œuvre essentielle pour quiconque souhaite voyager au Cambodge avec conscience. Ce film offre une clé de compréhension unique de la résilience remarquable du peuple cambodgien qui a su renaître après l’horreur. En alliant découverte des merveilles d’Angkor et tourisme de mémoire, le voyageur participe à un acte de transmission et de respect envers un pays dont l’histoire récente reste gravée dans les paysages et les regards.

Visualiser la vidéo de la bande annonce en VO

Nous l’avons vu et kiffé, à vous maintenant.

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FAQ

Le film est-il basé sur une histoire vraie ?

Oui, « La Déchirure » est basé sur l’histoire vraie de Sidney Schanberg et Dith Pran, qui ont couvert les événements tragiques au Cambodge pour le New York Times. Le film s’inspire également du livre « The Death and Life of Dith Pran » écrit par Schanberg.

Quels sont les principaux thèmes abordés dans le film ?

Les principaux thèmes abordés dans « La Déchirure » sont l’amitié, la loyauté, la culpabilité, les horreurs de la guerre et les conséquences tragiques de la dictature des Khmers rouges sur la population cambodgienne.

Le film a-t-il été récompensé ?

« La Déchirure » a remporté plusieurs récompenses, dont trois Oscars en 1985 : Meilleur acteur dans un second rôle pour Haing S. Ngor, Meilleure photographie et Meilleur montage. Le film a également été nommé dans quatre autres catégories, dont Meilleur film et Meilleur réalisateur.
Parce que je m’intéresse à mes origines, alors je m’informe à travers les expérience de mes parents, de notre voyage au Cambodge, de quelques livres et de nombreux articles sur internet. Aussi je me nourris de nombreux documentaires et reportages sur le Cambodge qui sont diffusés régulièrement à la télévision ou de vidéos sur la toile. Les vidéos de Nicolas Bailleul nous montrent de jolies images, je lui avais consacré une interview il y a quelques mois.
Puis il y a de nombreux films qui valent la peine d’être vu car ils sont très bien réalisés. La déchirure en fait partie. Il y a quelques mois, j’ai regardé ce film sur l’histoire du Cambodge et je vous recommande vivement de le regarder.

2 réflexions au sujet de “La Déchirure et le voyage culturel au Cambodge”

  1. c’est un film magistral. j’ai visité la prison S21 à Phonm Penh et nous avons été très émus. Comment ne pas être bouleversé par ce génocide? le Cambodge mérite mieux que ce qu’il aussi en train de vivre avec ce dirigeant d’un autre temps qui tue des travailleurs du textile qui ne demandent qu’à vivre dignement.

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